Association des Travailleurs Maghrébins de France
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Houceima : VOLS ORGANISES LEGAUX : détournement de l’aide

Les deux camionnettes de Gennevilliers sont arrivées au port de Nador le samedi 6 mars à 14h. Elles ont été acheminées par trois jeunes de Gennevilliers originaires de TEMSAMEN et d’un autre d’Aulnay-Sous-Bois. Au port, les jeunes apprennent que toutes les aides dont la destination n’a pas été enregistrée par l’Ambassade du Maroc et les autorités locales en collaboration avec les associations locales va directement à la fondation Mohamed 5 !!!

Les jeunes ont été obligés pour sortir du port de signer un bon de livraison à la Fondation et ce malgré leurs protestations et l’intervention de Youssef HAJI au téléphone.

Les portes des deux camions ont été plombées et on a retiré leur passeport à ces bienfaiteurs sympathisants de l’ATMF. Les négociations ont durés trois heures sur le port et décision a été prise d’avaler son humiliation et de prendre le convoi avec la gendarmerie jusqu’à AL HOUCEIMA.

A 22h, les camionnettes arrivent à AL HOUCEIMA. Les membres présents de la coordination AL AMAL et le représentant de l’ATMF rassurent les jeunes convoyeurs et attendent l’arrivée des gendarmes pour négocier la destination des dons rassemblés par les jeunes eux mêmes et les militants de l’ATMF de Gennevilliers. A 1h du matin, nous avons épuisé tous les sujets de conversation concernant le sinistre, l’enclavement du Rif, la HOGRA ressentie ici et de l’autre côté de ma méditerranée, le travail qui se raréfie, les programmes de la télé marocaine captés en France qui ne changent pas pour accompagner le deuil des familles alors que cette même grille de programmes, deux semaines auparavant, a été chamboulée lors de la CAN 2004, … Les 4000 Kms parcourus, le stress, la fatigue nous poussent enfin à aller à la permanence de la douane d’EL HOUCEIMA pour s’inquiéter du retard des gendarmes, récupérer les passeports et quémander le droit d’ouvrir notre camionnette.

A cette permanence aucune présence de douaniers dans les bureaux sauf des discussions qui s’échappent de deux tentes installées sur le parking. Un douanier en pyjama sort de l’une des tentes et nous suggère de repartir là d’où nous venons et de tenter de trouver un interlocuteur à la Wilaya.

Le membre de la coordination EL AMAL qui nous accompagne nous donne le numéro téléphone du portable du Wali en personne. Youssef téléphone et tombe sur une messagerie, ne laisse pas de message ; mais à sa surprise il est rappelé par ce dernier. Il expose les faits, assure le Wali que cette aide de l’ATMF n’est nullement destinée ni à la fondation Mohamed 5, ni au marché de la contrebande, ni à la Salafia el Jihadia, que cette aide est destinée aux pauvres sinistrés, aux village reculés que nous avons recensés avec les militants de la coordination EL AMAL et par nos propres réseaux de rifains de France. Nous exprimons aussi au Wali notre indignation quant à l’accueil réservé à la crème de la jeunesse marocaine vivant en France qui laisse travail et loisirs pour venir participer à cet élan de solidarité citoyenne.

Au grand étonnement de Youssef, le Wali manifeste une qualité d’écoute indéniable à laquelle nous ne sommes pas habitués dans cette portion de la Méditerranée, et nous promet l’arrivée des douaniers sur place pour régler ce problème.

A 2h du matin, toujours sous la brume d’EL HOUCEIMA, nous négocions au téléphone avec un responsable de la douane qui nous propose sans fou rire de repartir sur l’aéroport d’EL HOUCEIMA afin de refaire les formalités administratives. Nous refusons la proposition pour la simple raison que ni les conducteurs, ni notre état de fatigue ne nous permettent de reprendre la route pour regagner l’aéroport. 20 mn après, les douaniers arrivent, nous réclament le bordereau signé au port de Nador et exigent le retour des camionnettes au dépôt de la fondation M5. Rebelote, discussion, négociation, téléphone entre administrations, attroupement. Arrive alors un jeune issu de l’immigration grenobloise qui nous informe que notre cas n’est pas unique, qu’il s’est fait lui aussi « entuber ». Le contenu de sa camionnette destiné à un village de la région a été détourné vers cette même Fondation M5. Le jeune homme est blême et n’arrête pas de sautiller en répétant « les enfoirés m’ont eu » et « ma mère m’avait dit que je n’avais pas à me mêler de tout cela ». Youssef oublie les douaniers et essaye de calmer le jeune grenoblois en lui assurant qu’on allait s’occuper de son cas et qu’il ne partira pas à Grenoble sans superviser lui-même la distribution des ses dons. Le jeune, mélangeant le rifain, le verlan et l’arabe, nous répète que c’est plus que des dons, c’est du matériel tout neuf sponsorisé par Décathlon entre autres et la récolte d’argent de la jeunesse grenobloise. Nous apprenons plus tard que Abdelwahab (c’est son prénom) est un sportif connu dans la région pour l’organisation de tournois de foot en salle de haut niveau.

Le chef douanier, toujours dans sa voiture, donne son accord pour qu’on puisse entrer dormir mais à condition de nous escorter et d’enregistrer le lieu de notre hébergement ! Nous nous dirigeons vers le quartier de notre ami Belhaj de Gennevilliers avec les camionnettes toujours plombées. Le chef douanier nous indique avec un ton dégoûté que nous n’avons toujours pas le droit d’ouvrir les portes des camionnettes avant le matin. Les jeunes commencent à perdre patience et signalent au chef douanier qu’ils doivent récupérer leurs affaires, les clés de la maison… et qu’ils sont jusqu’à maintenant très corrects car ils lui demandent l’autorisation d’ouvrir leurs propres camionnettes. Alors que les douaniers de Nador dans un zèle d’incompétence très makhzénien avaient omis de plomber les portes latérales des deux camionnettes. Rires étouffés de tout le monde, douaniers compris, sauf le chef qui joue son rôle de responsable à 2 dirhams. Youssef perd le sud de la méditerranée et arrête toute négociation en regrettant haut et fort qu’Allah n’est pas juste, il aurait dû frapper plus fort dans son tremblement de terre pour qu’EL HOUCEIMA et sa région soient repoussées un peu plus au nord pour épouser la côte espagnole. Le chef devient blême, téléphone, demande le numéro de la carte nationale de l’accompagnateur de la coordination EL AMAL, et avec une suffisance makhzéniennne, nous dit : cette fois-ci, je vous laisse faire mais la prochaine fois, il faudra vous organiser autrement !! Kafka, dépassé par cet absurde, doit certainement se retourner dans sa tombe et la baraka d’Abdelkrim EL KHATTABI a sauvé les camionnettes de Gennevilliers. Il est 3h30 du matin. Les gennevillois auront 3 h de sommeil pour être réveillés vers 7h par une secousse d’une magnitude sismique de 5, 3° leur souhaitant la bienvenue.

Aujourd’hui, mardi 8 mars, journée internationale de la femme, nous avons une pensée pour les femmes qui luttent pour l’égalité, la fin de l’hégémonie du mâle, … Mais, tout cela, c’est du blabla, car notre énergie est axée uniquement sur la récupération des dons du Grenoblois Abdewahab pour lui rendre sa dignité masculine bafouée.

Au secours, rendez-nous le camion de Grenoble, sinon on fera appel au Zelzal pour faire tomber l’impressionnant bâtiment d’EL ÂMALA (préfecture) avec son architecture basriste.

EL HOUCEIMA Le 8 mars 2004

NB : Fait de Youssef, aidé par Larbi, excusez nous les fautes et les formulations de phrases, nous travaillons dans des conditions minimales.

Contact, information et presse :
Youssef HAJI, Larbi MOCHHOURY
ELHOUCEMA et sa région tél : (00 212) (0)70 28 74 71
France : Collectif SOS EL HOUCEIMA,10rue Affre 75018 Paris,
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