Témoignages et communiqué
Elhouceima,le 10 mars 2004
Par Youssef HAJI et Larbi MOCHHOURY
Mardi matin, Youssef reste sur EL HOUCEIMA pour une rencontre avec des journalistes, Larbi décide de sortir sur le terrain, il se rend à la permanence du collectif AMAL, qui regroupe une trentaine d’associations.
Programme de la matinée : deux convois composés d’un gros camion en provenance de Hollande que les membres du collectif ont pu sauver de justesse à 3h du matin. Recensement, liste des village effectué entre temps, le départ est prévu vers 9h sous escorte des Gendarmes. Voyant ces derniers, Larbi préfère partir avec l’autre convoi composée d’une camionnette et de militants enseignants (dont un ancien militant de ATMF des années 70 qui n’ arrêtait pas de nous embrasser ) de la petite ville de Rhafsai de la région de Taounat.
Départ est pris vers le village d’IKRICHEN, 12 Km sur la route dont 5 km de pistes, ce village sur les montagnes du Rif est composé d’une quarantaine de familles, sur la route le convoi s’arrête laissant le passage à un seigneur de la France, Le Letle big Big Ministre de l’intérieur, cher à notre ami Younès Ajarrai, M. SARKOZY se rendait à Elhouceima. La camionnette reprend la route puis la piste ( piste temporaire qui remplace l’ancienne route détruite par les inondations de l’année dernière, elle a été financée mais jamais réalisée ?!), arrivée sur place, le comité du village nous accueille avec la sincérité et la chaleur propre au caractère « rifi » de cette région, déchargement des dons, ils sont bien organisée, ils feront le partage entre eux plus tard car ils étaient plus préoccupés à nous montrer le désastre qu’ils avaient subis par le séisme, maisons détruites, murs en croix (comme ils disent ici c’est à dire murs fissurés), animaux tués, bergeries détruites…l’horreur naturelle.
En s’attardant dans une maison détruite et exactement auprès d’un lit qui a reçu le mur de la chambre, on apprend que la femme est encore vivante, blessée et qu’elle vomit du sang et ceci 12 jours après la catastrophe, le fils qui l’a sauvé est encore traumatisé vit dans la nature depuis, sachant qu’ils n’ont vu personne et non eu aucune assistance et encore moins la solidarité et des dons. Larbi ressent malaise et frustration (sentiment qui rappel le cheek point de Toufah en Palestine), décide ne plus repartir sans la dame, les amis des associations locales prennent les choses en main, téléphone à la permanence et partout…enfin, une ambulance arrive nous annonce -t-on, mais elle refuse de rouler sur piste, Larbi ne bouge pas, une camionnette arrive et propose d’emmener la dame, arrivée jusqu’à l’ambulance, la prise en charge a été correcte avec promesse d’envoyer une équipe médicale sur place en voiture adaptée pour le fils et les autres villageois. Nous apprenons plus tard que la dame à été larguée aux urgences où elle est restée ignorée dans un petit coin. De nouveau, mobilisation, téléphone…Elle a été vu par une équipe de médecins qui lui ont passée des radios et le nécessaire. OuFFFFFFF.
Retour à EL HOUCEIMA ville, rencontre avec la journaliste de TELQUEL (hebdomadaire marocain) qui propose quatre articles sur cette catastrophe. A 17h, décision est prise d’aller passer nuit à la montagne nuit chez des villageois sinistrés (49 morts) et presque toutes les maisons hors service. Arrivée la nuit, on nous dépose sur la route, il faut aborder une piste et une montagne à pied avec un accompagnateur d’une association locale, Larbi râle (il n’aime pas marcher), reçu chaleureusement par les familles, la soirée s’est déroulée amicalement mais quand même endeuillée (plus de 10 dans la familles et proches). Nuits passées agréablement sous une tente malgré deux secousses à 4h du matin d’une magnitude de 4’5, renflant sous ses couvertures Larbi n’a rien entendu. Réveil à 6h du matin, la visite des maisons et des personnes en deuil commence. Impossible de trouver des mots exact pour décrire la situation, cette zone est parmi les plus sinistrées dans cette catastrophe, il faut tout reconstruire, les photos (si on arrive à les joindre à texte) pourront peut être mieux décrire la situation. Il faut savoir, confirmation des habitants, enregistrement vidéo à l’appui effectué sur place. A part la société civile, personne n’est venu les voir ni de l’administration ni les élus du coin ni les autorités locales. Pour chaque mort une petite somme d’argent a été donné aux proches comme « AAZZO » (pratiques courantes dans ces circonstances chez les marocains sachant que 500 ou 1000Dhs équivaut à 1000 euros en France tellement la pauvreté est flagrante). Après le sentiment de deuil et les manquements de responsabilité des autorités constatés, la rage mélangé à la Hougra (humiliations) s’installent, Que faire ???????????
Sur la route principale, une rencontre avec une délégation de la CDT ( Confédération syndicale marocaine), venue visiter une école, est entamée, attroupement des gens, une discussion s’est imposée avec unanimité de toutes les personnes présentes, de quoi s’agit -t – il ?
Sentiments d’humiliation, d’abandon, d’absence de l’administration, vol organisé par les représentant de l’état, de l’hypocrisie des médias et du discours officiel. Les gens rientt de douleur en nous rencontrant que les voiture 4X4 du la fondation M5 arrivent uniquement pour faire les 100 m de pistes praticables, s’arrêtent avec leurs tenues militaires des assistances sociales pointent leurs nez dehors et demandent si tout va bien, quelque fois des jeunes assistances encore dignes avec des jeunes médecins stagiaires essayent de réconforter un malade. Souvent la 4X4 a encore la plaque de transport touristique d’une société de location de Marrakech ou de Zagoura, le chauffeur habitué au transport de touristes fait une gueule de dromadaire enragé. C’est cela l’accompagnement des victimes façon Makhzeniène d’un Maroc nouveau. Nous répétons à tue tête comment les nouveaux cadres du Makhzen bronchés sorti des grandes écoles américaines n’arrivent pas à organiser l’aide nécessaire à une population en détresse dans un rayon qui ne dépasse pas 20 Km. Sachant que l’aéroport de EL Hoceima et le port de Nador croulent sous l’aide internationale et de toutes les villes marocaines. Tout ceci a été constaté aussi par nos amis(es) du collectif AMAL d’EL Houceima devant des journalistes hier.
Il faut savoir que tous les hôtels sont quotidiennement réservés par les autorités afin d’exclure tous les journalistes, internationaux, bref les nuisibles. Voilà l’utilisation concrète de l’argent récoltés au niveau international et sur le compte 101 numéro bancaire de solidarité au Maroc
Nous apprenons aussi que l’état marocain ignore complètement les autorités locales du petit bourg jusqu’à la ville d’Elhouceima, tout est canalisé par l’armée et la fondation M5, on se croit dans un régime stalinien avec Babouche et cravate Hermès.
Les rencontres, les veillées de deuil, les échanges avec les militants, habitants, paysans, et petits commerçants de la région épuisés vont dans le sens que seul une présence des militants d’associations issus de l’immigration qui connaissent les magouilles des autorités pour maquiller les réalités catastrophiques des désastres, peuvent être un garde fou pour contrôler, témoigner, dénoncer les détournement organisées, c’est cette présence qui pourrait aussi préparer et accueillir les acteurs de la solidarité internationale pour qu’ils ne soient pas découragés par le harcèlement de l’appareil de contrôle makhzennien mis en place dans le rif.
La proposition faite aujourd’hui à tout (es) militants(es) du réseau ATMF, à son CA et BN d’étudier proposer en urgence la constitution de missions de volontaires pour l’observation, la vigilances, et la protection des douars et villes sinistrées du Rif, il s’agit concrètement d’envoyer une centaine de volontaire de différents pays européens et les répartir sur les différentes localités.
Autres demandes :
1 – étudier la publication rapide d’un dépliant et/ou affiche bilingue sur les mesures de prévention et de conseil concernant les tremblements de terre, les conséquences sur les personnes. Aujourd’hui, les secousses continuent à se ressentir dans la région, la population mal informée est terrorisée. Nous avons eu le cas d’une petite fille de 11ans qui refusait de dormir dans sa maison, ses parents croyant bien faire l’ont transporté dans son sommeil de la tente à l’intérieur de la maison. Une secousse dans la nuit lui a fait perdre la parole depuis dimanche dernier.
2 – les différents militants des deux coordinations travaillant sur El-houceima ont accueilli favorablement la gestion des dons personnalisée aux nécessiteux. L’argent récolté par le collectif national « SOS ElHouceima » doit être affectés d’urgence à ces besoins.
3 – La gestion des projets à moyen et long termes doit être gérée en partenariat avec les ONG spécialisées et les collectivités locales en étroites collaboration avec les deux coordination d’El houceima. Une proposition a l’étude de la part d’un des collectif pour organiser un forum avec l’ensemble des porteurs de projets et ONG dans 2 ou 6 mois à El houceima
4 – Bonne nouvelle pour le cas du jeune Mohamed, on a exigé l’obtention de son passeport en 24h, reste le Visa, nous attendons une réponse pour vendredi sinon lancement d’une campagne d’Email et Fax aux quai d’Orsay et au consulat de France à Tanger, Mohamed et sa famille franco-marocaine se présenteront au consulat lundi prochain. Il faut prévoir un accueil digne et chaleureux en France pour son arrivée avec représentants de l’ATMF et Médias.
5 – Nous interpellons tous les membres de notre réseau à mobiliser la presse (locales et nationales), les médias, les radio( Radio beurs, soleil, TSF, amitiés…) pour dénoncer ce qui se passe à El hoceima. Nous pensons que c’est la moindre des choses à faire d’urgences
6- Nous pensons qu’il y a nécessité de présence sur place de notre réseau jusqu’à la fin de la semaine afin de finir le travail entamé (notamment le départ du jeune Mohamed, le suivi avec les deux coordinations…), rester informés de la situation au quotidien et enfin rester en liaison avec la presse marocaine et internationale.