LE RIF A BESOIN DE VOTRE PRESENCE
Par Youssef HAJI
Ce mardi 16 mars 2004, il pleut sur Al Hoceima et sa région, trois jours que les gens « dorment » sous la pluie, la recherche de tentes devient l’activité principale. Pendant que M6 est montré à la TV Marocaine en train d’embrasser des écoliers réquisitionnés, lavés, parfumés et habillés , les instituteurs font un sit-in devant l’académie d’Al-Houceima pour demander des tentes et exiger la décharge de toute responsabilité en cas d’écroulement d’écoles.
A la TV de Rabat, on annonce que les élèves sont dans les écoles, dans les rues et sentiers de la région d’Al Houceima, les enfants comme des anges tremblants ont peur des murs, de l’eau et de la nuit.
Les instituteurs ont la rage au cœur en regardant la TV de Rabat.
Ce mardi 16 mars 2004, il pleut sur Al Hoceima et sa région, les cadres de la fondation M5 slaloment avec des 4X4 de l’aide internationale, quant aux militaires et le petit peuple des fonctionnaires ils dorment dans de super tentes volées du stock destiné aux sinistrés. Aujourd’hui, ils s’activent pour une nouvelle mascarade, une énième visite du roi à El Houceima.
Ce mardi 16 mars 2004, il pleut sur Al Hoceima et sa région, j’ai acheté des bottes au souk car mes godasses sont « destroy » après mon départ à Imernissen le samedi 13 mars.
Imernissen, village de 170 familles à 2h30 de marche après Tazarine
Les représentants du village n’ont pas vu de présence de représentants de l’Etat ou de toute personne étrangère au village depuis les inondations du Ramadan dernier. Exception faite de deux gendarmes venus jeudi dernier pour dire aux habitants d’avoir la patience et d’éviter de parler aux journalistes en cas de présence de ces derniers dans la région. A part les gendarmes, je suis la première personne étrangère au village à être montée et la première à avoir dormi dans le village (sous une tente de camping).
Les villageois ont la rage au cœur en regardant les projecteurs au fond de la vallée du coté du village de Ben Zerkri en train d’éclairer la piste pour goudronner de nuit et à la hâte une piste pour le passage du cortège royal.
Les villageois demandent aux travaux publics un engin pour réparer la piste depuis les inondations du ramadan, sans résultat, ils ont pris quelques jours avant le tremblement de terre pour réparer la piste avec leurs propres moyens, le Kaïd de Ait ben Abdallah leur a interdit cela.
A Imernissen il n’y a plus de maison habitable
A Imernissen il n’y a jamais eu d’école
A Imernissen il n’y a jamais eu de dispensaire
A Imernissen il n’y a plus de piste
A Imernissen les villageois ont l’allure des montagnes, la patience de la roche, la sagesse des amandiers en fleurs, comme des anges blessés ils se serrent sous un ciel pluvieux et gardent le rire des enfants et la force frêle d’un olivier.
De la colline, la playa de calaéres est laiteuse, de la colline Rabat et lointaine, de la colline Simhnd, le fou du village avec un éclat de rire me dit a propos du compte 101 de l’Etat marocain pour l’aide au sinistré « Qu’ils prennent 100 et qu’il nous donnent 1 »
Youssef Haji représentant d’aide urgence du réseau Association des Travailleurs Magrébins de France (ATMF)
www.atmf.org