Association des Travailleurs Maghrébins de France
10 rue Affre - 75018 Paris
01 42 55 91 82 national@atmf.org

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Appel d’urgence pour soutenir le Collectif Al Amal

Al Hoceima le 15-03-04

Suite à une rencontre que nous avons eu aujourd’hui et après échange avec les membres des associations qui composent le collectif Al Amal et pour une efficacité de notre travail d’aide aux sinistrés d’Al Hoceima et de son aire rurale, nous lançons un appel d’urgence pour :

– Prise en charge des frais de location de notre nouveau local : 26400 DH
– Prise en charge des frais Internet, faxe et téléphones sur une période de six mois : 18 000 Dh
– Frais de transports sur 6 mois : 18 000 DH
– Don en matériel et bureautique : Photocopieurs, ordinateurs (dont ordinateur portable), imprimantes, Caméra vidéo et appareil photos numérique, chaises, bureaux, table pliantes…).*

Dans cet état d’urgence et d’épuisement humain et de rarification de nos propres ressources associatives et personnelles, nous avons besoin d’une présence de cadres associatifs et de volontaires opérationnels du Maroc d’Europe et d’ailleurs, afin de nous permettre une aide concrète en terme de gestion administrative, de communication et de préparation des défis de l’après tremblement pour que les projets de reconstruction puissent profiter aux habitants de la région avec un esprit participatif des habitants et de toutes les composantes de la société civile.

Monsieur Al Balaichi Coordinateur du collectif Al Amal
Monsieur Abdallah ZAZAA représentant de la Banque alimentaire et du collectif démocratie et Modernité.
Monsieur Youssef HAJI représentant d’entraide d’urgence réseau Association des Travailleurs Maghrébins de France (ATMF)

· NB : La Banque Alimentaire et ses partenaires ont déjà procédé à l’envoi de :
3 ordinateurs dont un neuf
2 imprimantes dont une neuve
2 postes Tv neufs + récepteur
un fax copieur et quatre téléphones fixes
des cartouches d’encre
quatre mégaphones
Un chèque de 2500.00 dhs d’une amie

Al Amal commission pour le soutien et de secours
des sinistrés du séisme de la région d’Al Houceima

22 rue Ibn Batouta. Al Hoceima

Tél : (00 212) (0)68 068 702

RIB CIH 230050 8116253211008702

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LE RIF A BESOIN DE VOTRE PRESENCE

Par Youssef HAJI

Ce mardi 16 mars 2004, il pleut sur Al Hoceima et sa région, trois jours que les gens « dorment » sous la pluie, la recherche de tentes devient l’activité principale. Pendant que M6 est montré à la TV Marocaine en train d’embrasser des écoliers réquisitionnés, lavés, parfumés et habillés , les instituteurs font un sit-in devant l’académie d’Al-Houceima pour demander des tentes et exiger la décharge de toute responsabilité en cas d’écroulement d’écoles.

A la TV de Rabat, on annonce que les élèves sont dans les écoles, dans les rues et sentiers de la région d’Al Houceima, les enfants comme des anges tremblants ont peur des murs, de l’eau et de la nuit.

Les instituteurs ont la rage au cœur en regardant la TV de Rabat.

Ce mardi 16 mars 2004, il pleut sur Al Hoceima et sa région, les cadres de la fondation M5 slaloment avec des 4X4 de l’aide internationale, quant aux militaires et le petit peuple des fonctionnaires ils dorment dans de super tentes volées du stock destiné aux sinistrés. Aujourd’hui, ils s’activent pour une nouvelle mascarade, une énième visite du roi à El Houceima.

Ce mardi 16 mars 2004, il pleut sur Al Hoceima et sa région, j’ai acheté des bottes au souk car mes godasses sont « destroy » après mon départ à Imernissen le samedi 13 mars.

Imernissen, village de 170 familles à 2h30 de marche après Tazarine

Les représentants du village n’ont pas vu de présence de représentants de l’Etat ou de toute personne étrangère au village depuis les inondations du Ramadan dernier. Exception faite de deux gendarmes venus jeudi dernier pour dire aux habitants d’avoir la patience et d’éviter de parler aux journalistes en cas de présence de ces derniers dans la région. A part les gendarmes, je suis la première personne étrangère au village à être montée et la première à avoir dormi dans le village (sous une tente de camping).

Les villageois ont la rage au cœur en regardant les projecteurs au fond de la vallée du coté du village de Ben Zerkri en train d’éclairer la piste pour goudronner de nuit et à la hâte une piste pour le passage du cortège royal.

Les villageois demandent aux travaux publics un engin pour réparer la piste depuis les inondations du ramadan, sans résultat, ils ont pris quelques jours avant le tremblement de terre pour réparer la piste avec leurs propres moyens, le Kaïd de Ait ben Abdallah leur a interdit cela.

A Imernissen il n’y a plus de maison habitable

A Imernissen il n’y a jamais eu d’école

A Imernissen il n’y a jamais eu de dispensaire

A Imernissen il n’y a plus de piste

A Imernissen les villageois ont l’allure des montagnes, la patience de la roche, la sagesse des amandiers en fleurs, comme des anges blessés ils se serrent sous un ciel pluvieux et gardent le rire des enfants et la force frêle d’un olivier.

De la colline, la playa de calaéres est laiteuse, de la colline Rabat et lointaine, de la colline Simhnd, le fou du village avec un éclat de rire me dit a propos du compte 101 de l’Etat marocain pour l’aide au sinistré « Qu’ils prennent 100 et qu’il nous donnent 1 »

Youssef Haji représentant d’aide urgence du réseau Association des Travailleurs Magrébins de France (ATMF)
www.atmf.org

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Photos de la mission de larbi et Youssef à Al-Houceima

Nos deux amis Youssef Haji et Larbi Lmochhoury se sont rendus au Maroc rencontrer les populations sinistrées, les soutenir et évaluer leurs besoins. Ils veillaient avec le collectif des associations locales sur l’acheminement réel des aides aux zones sinistrées et sur la réception des aides envoyées par les associations membres de l’ATMF.

Avec leurs témoignages ils nous ont aussi livré quelques photos que nous voulions partager avec vous…










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ATMF de Strasbourg: projection débat

Projection puis autour du film « Rêves de France à Marseille » de Jean-Louis Comolli et Michel Samson. Documentaire politique retrace le parcours d’un conseiller municipal sortant et d’autres militants issus de l’immigration lors des municipales de 2001.
Mardi 16 mars 2004
À 19H30 à l’Université Marc Bloch. A Strasbourg,

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Témoignages et communiqué

Elhouceima,le 10 mars 2004

Par Youssef HAJI et Larbi MOCHHOURY

Mardi matin, Youssef reste sur EL HOUCEIMA pour une rencontre avec des journalistes, Larbi décide de sortir sur le terrain, il se rend à la permanence du collectif AMAL, qui regroupe une trentaine d’associations.
Programme de la matinée : deux convois composés d’un gros camion en provenance de Hollande que les membres du collectif ont pu sauver de justesse à 3h du matin. Recensement, liste des village effectué entre temps, le départ est prévu vers 9h sous escorte des Gendarmes. Voyant ces derniers, Larbi préfère partir avec l’autre convoi composée d’une camionnette et de militants enseignants (dont un ancien militant de ATMF des années 70 qui n’ arrêtait pas de nous embrasser ) de la petite ville de Rhafsai de la région de Taounat.
Départ est pris vers le village d’IKRICHEN, 12 Km sur la route dont 5 km de pistes, ce village sur les montagnes du Rif est composé d’une quarantaine de familles, sur la route le convoi s’arrête laissant le passage à un seigneur de la France, Le Letle big Big Ministre de l’intérieur, cher à notre ami Younès Ajarrai, M. SARKOZY se rendait à Elhouceima. La camionnette reprend la route puis la piste ( piste temporaire qui remplace l’ancienne route détruite par les inondations de l’année dernière, elle a été financée mais jamais réalisée ?!), arrivée sur place, le comité du village nous accueille avec la sincérité et la chaleur propre au caractère « rifi » de cette région, déchargement des dons, ils sont bien organisée, ils feront le partage entre eux plus tard car ils étaient plus préoccupés à nous montrer le désastre qu’ils avaient subis par le séisme, maisons détruites, murs en croix (comme ils disent ici c’est à dire murs fissurés), animaux tués, bergeries détruites…l’horreur naturelle.
En s’attardant dans une maison détruite et exactement auprès d’un lit qui a reçu le mur de la chambre, on apprend que la femme est encore vivante, blessée et qu’elle vomit du sang et ceci 12 jours après la catastrophe, le fils qui l’a sauvé est encore traumatisé vit dans la nature depuis, sachant qu’ils n’ont vu personne et non eu aucune assistance et encore moins la solidarité et des dons. Larbi ressent malaise et frustration (sentiment qui rappel le cheek point de Toufah en Palestine), décide ne plus repartir sans la dame, les amis des associations locales prennent les choses en main, téléphone à la permanence et partout…enfin, une ambulance arrive nous annonce -t-on, mais elle refuse de rouler sur piste, Larbi ne bouge pas, une camionnette arrive et propose d’emmener la dame, arrivée jusqu’à l’ambulance, la prise en charge a été correcte avec promesse d’envoyer une équipe médicale sur place en voiture adaptée pour le fils et les autres villageois. Nous apprenons plus tard que la dame à été larguée aux urgences où elle est restée ignorée dans un petit coin. De nouveau, mobilisation, téléphone…Elle a été vu par une équipe de médecins qui lui ont passée des radios et le nécessaire. OuFFFFFFF.

Retour à EL HOUCEIMA ville, rencontre avec la journaliste de TELQUEL (hebdomadaire marocain) qui propose quatre articles sur cette catastrophe. A 17h, décision est prise d’aller passer nuit à la montagne nuit chez des villageois sinistrés (49 morts) et presque toutes les maisons hors service. Arrivée la nuit, on nous dépose sur la route, il faut aborder une piste et une montagne à pied avec un accompagnateur d’une association locale, Larbi râle (il n’aime pas marcher), reçu chaleureusement par les familles, la soirée s’est déroulée amicalement mais quand même endeuillée (plus de 10 dans la familles et proches). Nuits passées agréablement sous une tente malgré deux secousses à 4h du matin d’une magnitude de 4’5, renflant sous ses couvertures Larbi n’a rien entendu. Réveil à 6h du matin, la visite des maisons et des personnes en deuil commence. Impossible de trouver des mots exact pour décrire la situation, cette zone est parmi les plus sinistrées dans cette catastrophe, il faut tout reconstruire, les photos (si on arrive à les joindre à texte) pourront peut être mieux décrire la situation. Il faut savoir, confirmation des habitants, enregistrement vidéo à l’appui effectué sur place. A part la société civile, personne n’est venu les voir ni de l’administration ni les élus du coin ni les autorités locales. Pour chaque mort une petite somme d’argent a été donné aux proches comme « AAZZO » (pratiques courantes dans ces circonstances chez les marocains sachant que 500 ou 1000Dhs équivaut à 1000 euros en France tellement la pauvreté est flagrante). Après le sentiment de deuil et les manquements de responsabilité des autorités constatés, la rage mélangé à la Hougra (humiliations) s’installent, Que faire ???????????

Sur la route principale, une rencontre avec une délégation de la CDT ( Confédération syndicale marocaine), venue visiter une école, est entamée, attroupement des gens, une discussion s’est imposée avec unanimité de toutes les personnes présentes, de quoi s’agit -t – il ?

Sentiments d’humiliation, d’abandon, d’absence de l’administration, vol organisé par les représentant de l’état, de l’hypocrisie des médias et du discours officiel. Les gens rientt de douleur en nous rencontrant que les voiture 4X4 du la fondation M5 arrivent uniquement pour faire les 100 m de pistes praticables, s’arrêtent avec leurs tenues militaires des assistances sociales pointent leurs nez dehors et demandent si tout va bien, quelque fois des jeunes assistances encore dignes avec des jeunes médecins stagiaires essayent de réconforter un malade. Souvent la 4X4 a encore la plaque de transport touristique d’une société de location de Marrakech ou de Zagoura, le chauffeur habitué au transport de touristes fait une gueule de dromadaire enragé. C’est cela l’accompagnement des victimes façon Makhzeniène d’un Maroc nouveau. Nous répétons à tue tête comment les nouveaux cadres du Makhzen bronchés sorti des grandes écoles américaines n’arrivent pas à organiser l’aide nécessaire à une population en détresse dans un rayon qui ne dépasse pas 20 Km. Sachant que l’aéroport de EL Hoceima et le port de Nador croulent sous l’aide internationale et de toutes les villes marocaines. Tout ceci a été constaté aussi par nos amis(es) du collectif AMAL d’EL Houceima devant des journalistes hier.

Il faut savoir que tous les hôtels sont quotidiennement réservés par les autorités afin d’exclure tous les journalistes, internationaux, bref les nuisibles. Voilà l’utilisation concrète de l’argent récoltés au niveau international et sur le compte 101 numéro bancaire de solidarité au Maroc

Nous apprenons aussi que l’état marocain ignore complètement les autorités locales du petit bourg jusqu’à la ville d’Elhouceima, tout est canalisé par l’armée et la fondation M5, on se croit dans un régime stalinien avec Babouche et cravate Hermès.

Les rencontres, les veillées de deuil, les échanges avec les militants, habitants, paysans, et petits commerçants de la région épuisés vont dans le sens que seul une présence des militants d’associations issus de l’immigration qui connaissent les magouilles des autorités pour maquiller les réalités catastrophiques des désastres, peuvent être un garde fou pour contrôler, témoigner, dénoncer les détournement organisées, c’est cette présence qui pourrait aussi préparer et accueillir les acteurs de la solidarité internationale pour qu’ils ne soient pas découragés par le harcèlement de l’appareil de contrôle makhzennien mis en place dans le rif.

La proposition faite aujourd’hui à tout (es) militants(es) du réseau ATMF, à son CA et BN d’étudier proposer en urgence la constitution de missions de volontaires pour l’observation, la vigilances, et la protection des douars et villes sinistrées du Rif, il s’agit concrètement d’envoyer une centaine de volontaire de différents pays européens et les répartir sur les différentes localités.

Autres demandes :
1 – étudier la publication rapide d’un dépliant et/ou affiche bilingue sur les mesures de prévention et de conseil concernant les tremblements de terre, les conséquences sur les personnes. Aujourd’hui, les secousses continuent à se ressentir dans la région, la population mal informée est terrorisée. Nous avons eu le cas d’une petite fille de 11ans qui refusait de dormir dans sa maison, ses parents croyant bien faire l’ont transporté dans son sommeil de la tente à l’intérieur de la maison. Une secousse dans la nuit lui a fait perdre la parole depuis dimanche dernier.
2 – les différents militants des deux coordinations travaillant sur El-houceima ont accueilli favorablement la gestion des dons personnalisée aux nécessiteux. L’argent récolté par le collectif national « SOS ElHouceima » doit être affectés d’urgence à ces besoins.
3 – La gestion des projets à moyen et long termes doit être gérée en partenariat avec les ONG spécialisées et les collectivités locales en étroites collaboration avec les deux coordination d’El houceima. Une proposition a l’étude de la part d’un des collectif pour organiser un forum avec l’ensemble des porteurs de projets et ONG dans 2 ou 6 mois à El houceima
4 – Bonne nouvelle pour le cas du jeune Mohamed, on a exigé l’obtention de son passeport en 24h, reste le Visa, nous attendons une réponse pour vendredi sinon lancement d’une campagne d’Email et Fax aux quai d’Orsay et au consulat de France à Tanger, Mohamed et sa famille franco-marocaine se présenteront au consulat lundi prochain. Il faut prévoir un accueil digne et chaleureux en France pour son arrivée avec représentants de l’ATMF et Médias.

5 – Nous interpellons tous les membres de notre réseau à mobiliser la presse (locales et nationales), les médias, les radio( Radio beurs, soleil, TSF, amitiés…) pour dénoncer ce qui se passe à El hoceima. Nous pensons que c’est la moindre des choses à faire d’urgences

6- Nous pensons qu’il y a nécessité de présence sur place de notre réseau jusqu’à la fin de la semaine afin de finir le travail entamé (notamment le départ du jeune Mohamed, le suivi avec les deux coordinations…), rester informés de la situation au quotidien et enfin rester en liaison avec la presse marocaine et internationale.

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ATMF de Gennevilliers : Femmes maghrébines d’Europe : luttes pour les droits et réalités de l’immigration

Colloque international
Femmes maghrébines d’Europe :
Luttes pour les droits et réalités de l’immigration

Gennevilliers
Samedi 13 et dimanche 14 mars 2004

Organisé par :
Association des Travailleurs Maghrébins de France ATMF de Gennevilliers

En collaboration avec :
ATMF national, ATMF de Vauréal et ATMF d’Argenteuil

Avec le soutien de :

L’Institut Maghreb-Europe, Migrations santé et IDD Immigration Développement Démocratie.

Lieu du colloque :
Espace des Grésillons, Gennevilliers (à côté de la poste)
ligne 13, métro : Asnières/Gennevilliers Gabriel Péri.

Programme du colloque
Samedi 13 mars

9 :00 Accueil des participants.
9 :30 Exposé introductif de Mustapha MERIZAK Président de l’ATMF de Gennevilliers.

Matinée :
Luttes féminines au Maghreb, Maghrébines en lutte en Europe
Présidence : Marguerite ROLLINDE Chercheure Institut Maghreb- Europe

10 :00 Citoyennes d’Europe femmes de la bas : rôle des institutions européennes dans la légalisation de la discrimination. Par Alima Boumedienne députée européenne.
10 :30 Les conventions bilatérales et leurs incidences sur les femmes Maghrébine ou d’origine Maghrébine. Par Aicha Ansar-RACHIDI, Avocate à la Cour, Paris.

Pause café

11:00 Le code du statut personnel marocain une véritable révolution?: Par Leila RHIWI de l’association démocratique des femmes marocaines
11 :30 Le code de la famille algérien : une sous citoyenneté institutionnalisée pour les femmes : Par Chafia Djamane de Femmes plurielles.
12 :00 Débat

Après midi :
Femme marocaine migrante en Europe et réalités de l’exil : Approche comparative
Présidence Fouzia MAQSOUD vice présidente de l’ATMF nationale

14 :30 Pays- Bas, par Nora AZARKAN Association MVVN.
15 :00 Espagne par Touria El JEBARI , présidente de l’ Association Amal Andalusa.
15 :30 Belgique par Samira LAMRABET du Centre de solidarité féminine à Bruxelles.
16 :00 France par Fatima TOUALA, présidente de l’ATMF du Bassin Houiller Lorrain (BHL)

Pause café

16 :30 La nouvelle moudawana code de la famille et ses retombées sur les femmes immigrées par : Fatiha SAIDI, députée, parlement belge de Bruxelles.
17 :00 Débat
17 :30 Synthèse et conclusions.

20 :00 Dîner suivi d’animations musicales

Dimanche14 mars
Réunion du réseau des femmes marocaines d’Europe
09 :30 – 12 :00

Objet de la réunion : Organisation d’une caravane pour les droits de la femme marocaine.

Le projet :

L’idée est née au cours des différentes rencontres d’organisations de femmes résidant au Pays-Bas, Belgique, France et Espagne.
Le croisement des parcours de toutes ces femmes a révélé la similitude de leurs préoccupations et de leurs combats.
En effet, ces femmes citoyennes d’Europe restent sous le joug du code du statut personnel marocain la moudawana, qui est souvent en contradiction avec les lois des pays d’accueil situation qui finit par engendrer des drames humains dont les femmes sont les premières victimes.
Au delà de cette contradiction, ces femmes migrantes ne peuvent être indifférentes au sort de leurs concitoyennes résidant au Maroc.
Du coup la lutte pour l’égalité des droits en Europe ne peut être envisagée sans articulation avec la lutte pour les droits de la femme au Maroc.
Si cette idée de caravane a vu le jour avant les dernières modifications de la moudawana, son essence et son objectif demeurent d’actualité : l’égalité des droits entre les femmes et les hommes, même si les organisatrices sont conscientes des avancées réalisées récemment grâce à la persévérance et au travail acharné des organisations féminines et de la société civile pendant de longues années.
Cette caravane sillonnera tour à tour les Pays-Bas, la Belgique, la France et l’Espagne pour arriver enfin au Maroc.

Les objectifs :

– Aller à la rencontre des migrantes marocaines en Europe
– Porter leurs revendications
– Informer l’opinion publique européenne sur la situation de la femme marocaine migrante
– Organiser une action commune avec les organisations marocaines au Maroc pour fusionner le travail des Marocaines au Maroc et à l’étranger.
– Initier les bases d’un nouveau débat sur l’égalité des droits entre les hommes et les femmes au Maroc.

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Quand les auxiliaires de l’Etat tentent de violer les femmes sinistrées

Le 28 février 2004, vers 1h30 un membre des forces auxiliaires a pénétré dans la maison de madame Latifa Massoudi, se situant dans la région de Aït Abdellah, à environ 35 km de la ville d’Al-Houceima.

Cet agent des forces auxiliaires, a prétendu qu’il a été mandaté par le Kaïd d’Aït-Abdellah, pour constater les dégâts que la maison a subi, et a tenté de lui faire croire qu’il allait intervenir pour qu’on la dédommage, qu’on lui apporte une tente et d’autres aides, puis a commencé à l’harceler sexuellement. Terrifiée, la jeune femme enceinte de quelques mois a commencé à crier au secours appelant ses voisins et les habitants du village qui ont tous accouru et ont arrêté l’agent.

Suite à cela le Kaïd a intervenu pour faire croire aux habitants que le coupable allait subir les châtiments les plus sévères, mais ceci n’a pas eu lieu.

Révoltés,les habitants sont tous sortis dans une grande manifestation pour exiger le retrait des forces auxiliaires.

Fait à Al-Houceima le 11/03/2004

ATMF, Association TIMMUZGHA Culturelle et Sociale.

NB : Traduit de l’arabe.

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Abdellah Zaâzaâ : Rapport de mission

Date Casablanca le 8 mars 2004-03-08

Durée de la mission
Du 25 février au 8 mars 2004

La décision

La décision de partir pour Alhuceima est survenue mardi 24 février à 16 h 00 (le jour même du séisme qui a frappé cette ville) suite à des concertations par téléphone entre différents membres du collectif qui s’est regroupé autour de la banque alimentaire. De mon coté ces contacts téléphoniques ont eu lieu directement avec Atiqa Souiker et Kamal Lahbib.

Je suis parti mercredi matin 25 février et arrivé le soir à 19h30

Objectifs de la mission

Sur la base de la décision de la Banque Alimentaire de participer au soutien des victimes du séisme l’objectif initial de ma mission était de répondre à une demande pressante des donateurs adressée à la B.A. concernant le contrôle de l’équité de la distribution.

La réalité et les obstacles rencontrés ont ajouté à ce premier objectif ceux de :
· Assurer la sécurité des arrivages
· Renforcer les capacités de notre partenaire associatif local

Les membres de la mission

D’abord moi-même Abdellah Zaâzaâ,

Rachida Sadouk (qui est aussi mon épouse) qui a aidé par ses observation du fait de son expérience en matière de travail de proximité, joué le rôle de standardiste et assurer la prise de photos,

Enfin Adil Rachdi un jeune militant d’Alhuceima qui s’est joint à nous et à pris en charge l’axe administratif. (Depuis notre retour il est assure la représentation de la Banque Alimentaire et de ses partenaires)

Présentation du partenaire local

Avant le départ en mission Kamal Lahbib et moi avons pris des contacts locaux :

Une association locale régionale
Une personnalité associative locale, Ahmed Belaïchi.

La discussion avec ce dernier, nous a convaincu progressivement que notre démarche recevrait l’appui des petites associations de proximité.
Effectivement vingt quatre heurs après c’est-à-dire à notre arrivée à Alhoceima nous sommes tombés en plein milieu de l’assemblée générale constitutive de « La Commission Al Amal pour le Secours et le Soutien des Sinistrés de la province d’Alhoceima, ou Al Amal » qui comprend en son sein une trentaine d’associations, principalement villageoises.
Cette structure recevait déjà des messages de soutien de différentes régions du Maroc et d’Europe, et préparait son dispositif de soutien aux sinistrés en milieu rural considéré comme prioritaire.

Distribution

Le premier arrivage de la B.A est survenue jeudi matin 26 février vers dix heures à été le premier chargement de vivres distribué aux populations à l’échelle de toute la province d’Alhuceima.

D’autres arrivages de la B.A. et d’autres partenaires Al Amal ont eu lieu à partir du vendredi date à laquelle d’autres opérateurs associatifs et internationaux commençaient à intervenir.

Les distributions des autorités publiques et communales ne sont devenues visibles qu’après la visite royale qui a eu lieu le 28 février.

Procédure de distribution

Le schéma général de la distribution à été dés le début le suivant :
1. A son arrivé le camion est livré à Al Amal
2. Al Amal et la B.A accompagnent le ou les camions dans une localité où il est livré à une ou deux associations locales.
3. Les associations et les représentant de douars répartissent le chargement en lots pour chacun des douars
4. Les représentants de douars et la population concernée établissent ensembles les listes et répartissent eux même les dons en fonction de listes
5. Se sont les populations elle-même qui procèdent au déchargement des camions (généralement dans un entrepôt, dans un local de commune, dans une mosquée ou encore dans la rue)

En tant que représentation de la B.A nous n’avons pu observer le déroulement de cette procédure que pour un nombre de chargements, du fait du nombre réduit que nous étions, que nous n’avions qu’un seul véhicule et parce qu’il fallait assurer l’accueil des camion qui étaient encore en route.

Nous avons procédé à des observation très précises dans les communes de Aït Qumra, Aït Youssef ou Ali, Bni Boufrah, Tala Youssef, Imzouren et Chaqrane (Voir en annexe).
A aucun moment nous n’avons constaté une contestation des listes établies et de la méthode de distribution que se soit de la part des bénéficiaires ou d’autres parties alors que cette distribution se faisait en plein jour et en plein air.

A aucun moment nous n’avons observé une tentative individuelle de porter atteinte à ces dons.

Nous expliquons cela par le fait que la procédure mise en œuvre fait du don une propriété collective de la population à l’échelle micro locale et se trouve ainsi protégé par la jmaâ qui impose une discipline collective difficilement transgressable.

Par contre nous avons pu constater des réactions différentes lors d’une distribution opérée par une Ong étrangère, la commune et notre propre partenaire associatif local (l’association villageoise).
Les dons étaient installés dans l’enceinte d’un petit souk sous protection de la partie donatrice. Le président de la commune et les représentants de l’association épelaient les noms des bénéficiaires. Les gens contestaient à tort ou à raison l’équité de la distribution chacun se présentant individuellement pour présenter ses réclamations et faire prévaloir ses priorités.
Notre conclusion à ce sujet est que la discipline collective de la population ne se développe que lorsqu’il est donné à cette population de se prendre en charge. Dans ce cas précis c’est que c’est elle qui assume la garde du bien collectif et le répartit entre les intéressés.
Autres apports dû à la présence de la B.a. au coté de Al Amal
La Commission Humanitaire de Fès pour le soutien des sinistrés d’Alhuceima à remis ses dons à la B.a. en assumant elle même le transport
Terre des hommes et l’association de ont amené leurs propres dons qu’ils ont remis à Al Amal. Terre des Hommes continue sur un projet avec la collaboration des associations locales membres de Al Amal
L’Atmf a amené des dons sur un projet spécifique à réaliser avec l’accompagnement de Al Amal
Un cabinet d’étude dirigé par Anis Balafrej propose de réaliser gratuitement des études en relation avec Al Amal
Etablissement de contact avec l’echevin de Scarbreek (Bruxelles)
D’autre part à notre retour nous avons eu une réunion avec deux militants associatfs de Fés dont Addahmani ou il a été conclu d’œuvre pour créer un pole associatif regroupant les différentes dynamiques associatives de Casablanca, Fés et Alhuceima

Obstacles rencontrés

1. perturbation et interruption de la circulation par les convois de troupes des forces de sécurité qui affluaient tous les jours vers la ville d’Alhuceima
2. Arrivage de camions et remorqueurs qui amenaient du matériel concernant la préparation de l’accueil des cortèges officiels
3. Du samedi 28 jusqu’à ces derniers jours interruptions quotidiennes de la circulation du fait des visites royales et princières et déroutages des camions vers l’aéroport.
4. Imposition de démarches procédurière pour récupérer les camions.
5. Détournement : Dimanche 8 décembre un camion venant de France conduits par des jeunes sous le parrainage de l’Atmf est plombé par la gendarmerie de Nador pour être livré à la Fondation Mohamed V
6. Ce jour même un autre camion diligenté par Insaf et adressée à la Banque alimentaire a été saisi à l’aéroport de Nador pour être remis à la Fondation Mohamed V
7. Le pillage dû en partie à la réaction des habitants de la ville et des fortes agglomérations qui constataient la non distribution des vivres amenés par les centaines de camion qui affluaient quotidiennement vers la région.
8. Dans un douar nous avons constaté qu’autorité public et directeur d’école ont refusé de fournir aux habitants un local pou y décharger les dons que nous amenions

Concernant les camions de la B.a. Aucun camion n’a été détourné, Tous ont été livrés aux associations locales le jour même de leur arrivée sauf dans les cas où ces camions arrivaient tard le soir. Aucun de ces camions n’a subit de pillage

Cependant les obstacles cités plus haut ont engendré une très grande dépense d’énergie, de perte de temps au dépends du travail d’enquête.

Conclusions

Le collectif regroupé autour de la Banque alimentaire a réalisé son objectif de participer au soutien et au secours des sinistrés d’Alhuceima
Avec le concours d’Al Amal il a expérimenté une autre façon de faire qui responsabilise les populations.

Cependant le collectif comme tous les acteurs du développement social doivent être conscient que ce qui s’est passé à Alhuceima peut se transformer en une chance pour le développement du pays ou au contraire ou approfondir la déchirure entre l’Etat et les populations.

Perspectives

Aujourd’hui la situation à Alhuceima impose :
1. Definir le rôle de la société civile en cas de catastrophe et dresser un programme conséquent
2. de sensibiliser les acteurs associatifs marocains et les différentes autorité compétentes à élaborer un programme de réhabilitation et de développement de la zone sinistrée d’Alhuceima. De faire de ce programme une question d’intérêt national.
3. Soutenir et renforcer la position Al Amal qui avec nous et ses autres partenaires dirige une expérience pilote efficace et responsable de la gestion de l’intérêt publique avec la participation de la population, pour en faire un acteur incontournable dans l’élaboration du programme de développement social de la région
4. Que la B.A. se désengage progressivement de l’aide, reconstitue des stocks, assumer ses engagements précédents et se tienne prête à participer à soutenir des projets dans la région sinistré, des projets qui entrent dans le cadre de sa mission.

Le coût de la mission

Essence + péage de l’autoroute …………………………………… .. 1135.00 (Bons de 515 dhs)

Téléphone ……………………………………………………………… 1 260.00 ( bon de 300 dh)

Fax ……………………………………………………………………… 360.00 (Pas de bons)

Photocopies…………………………………………………………… 50.00 (Pas de bons)

Tirage de photo ………………………………………………………… 498.00 (bons de 318 dhs)

Hotel ………………………………………………………………… .1587.00 (bon de 1527 dhs)

Restaurant…………………………………………………………… 2 700.00 (Pas de bons)

Total……………………………………………………… 7 590.00 dhs

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Fatiha saidi : temoignage d’al houceima

A toutes les victimes du drame, avec une pensée émue à toutes celles et tous ceux qui vivent, depuis le mardi 27 dernier un véritable enfer sur terre.
Avec mes remerciements les plus sincères à toutes les personnes qui m’ont servi de guides, éclairés de leurs témoignages et gratifiés de leur confiance…

Quand toute une société tremble…
Al Hoceïma, du 27 au 29 février 04

Vendredi 27 février 04

Il est 10 heures ce vendredi et le voyage Bruxelles-Oujda aura duré exactement 14 heures, après mille péripéties liées officiellement à des contraintes météorologiques forçant l’équipage à une escale à Fès! Sur la route qui mène de Oujda à Al Hoceima, dès l’entrée dans la ville de Nador, l’effervescence d’une région en proie à une situation «extra-ordinaire» est palpable. Entre Driouch et Tiztoutine, la route se couvre brusquement d’un convoi impressionnant de camions kakis, bondés de militaires. Un peloton d’une cinquantaine de véhicules, sans compter les jeeps et les motards d’accompagnement.

A Nador, un camion arbore fièrement des drapeaux marocains. Un groupe d’hommes se démènent pour le remplir et le bâcher tandis qu’un calicot terminera la tâche «les habitants de Nador contribuent à l’aide pour la ville d’Al Hoceima». A Beni Bourayach, située à une vingtaine de kilomètres de la ville d’Al Hoceima, une longue file de manifestants (uniquement des hommes), solidement encadrée par des citoyens défilent, dans le calme et l’organisation tout en brandissant des calicots revendicateurs : «Nous sommes dehors. Et les tentes ?», «Beni Bourayach, en danger»… Après le pont, à la hauteur du marché, les commerçants sont affairés ; l’ensemble des magasins sont littéralement pris d’assaut pour l’achat de bâches en plastique, vendues au métrage, qui serviront à l’édification de tentes de fortune. Le prix de ce plastique au mètre est passé de 6 dirhams (0.6 euros) à 30 dirhams (3 euros), après le tremblement de terre.

Dès l’entrée de la ville à Al Hoceima, sur le bord de la route, le spectacle est impressionnant. L’ampleur des dégâts est considérable ; des maisons éventrées, abandonnées par leurs habitants sont remplacées par de petites huttes en plastique qui font office d’abris de fortune. Les femmes se sont visiblement déjà organisées, pour que la vie puisse reprendre son cours. Elles s’affairent à l’extérieur, pendent le linge sur des fils tendus d’une tente à l’autre, cuisinent sur des petits gaz de camping.

Après une visite rapide à la famille, je me rends immédiatement à Imzouren, dans le cœur de la ville. Ici le spectacle est encore plus terrifiant que sur le fronton de route. La ville est déserte, les maisons qui tiennent encore debout semblent avoir été la proie d’intenses bombardements. Quant à celles qui ont été détruites, elles s’amoncellent, tas de gravats, de carrelages, d’armatures en fer, de vaisselle, de literies, de meubles… Dans ma mémoire, les images enregistrées à Jenine et celles-ci s’entrechoquent. Je cherche en vain des témoins. Impossible. L’entièreté des habitants se sont réfugiés sur une esplanade en dehors du cœur de la ville et sur la place du marché.

Saïd Androuss, l’architecte qui m’accompagne m’explique que nombre de ces maisons sont construites par des «immigrés» et ne sont donc habitées qu’à leur retour. C’est ce qui explique le nombre de décès particulièrement peu élevé, en regard des destructions (140 personnes si l’on en croit les chiffres qui me sont remis), et en comparaison avec des bourgades rurales un peu plus éloignées. L’architecte fustige les constructions qui ont été construites, sans respect des normes architecturales. «Regardez, ici nous sommes dans une zone dénommée HB3, ce qui entend qu’aucun immeuble ne peut être érigée au-dessus de 3 étages. Ici on en compte déjà 4. Et les maisons se sont effondrées comme des châteaux de cartes. Par ailleurs, les suivis de chantiers sont rarement effectués et les futurs propriétaires, une fois le plan de leur maison en poche, se tournent vers des entrepreneurs qui réaliseront les travaux, sans l’œil averti des professionnels».

Nous rencontrons enfin un groupe d’hommes qui viennent aussi se rendre compte de la situation, l’air grave. Ils m’expliquent que ce qu’ils craignent le plus c’est l’abandon de ce village par les habitants, découragés et peu désireux de continuer à investir dans une zone qui semble aujourd’hui maudite et depuis bien longtemps enclavée et abandonnée. Un hélicoptère tournoie au-dessus de nos têtes depuis une dizaine de minutes, tandis que des bateaux arrivent dans le port. «La préparation de la visite royale, commentent les hommes».

Le cœur névralgique de la ville d’Imzouren, outre le fronton sur la route et la place du marché est le lycée, qui donne son nom à ce quartier des enseignants, qui n’aurait jamais cru se voir un jour propulser à une échelle médiatique aussi intense. Quelques habitants s’y sont réfugiés également. Quelques mètres plus loin, un terrain vague accueille une dizaine de tentes de fortune, bricolées dans l’urgence ; couvertures, peaux de mouton, nattes tressées en osier ou en plastique se superposent, soutenues par des poutres, récupérées pour la plupart dans les gravats.

Mohamed El Hankouri, un conseiller communal rencontré au hasard de la visite m’indique que l’aide humanitaire existe bel et bien mais que la distribution est inégalement répartie. Tout en discutant avec lui, une espèce de forte bourrasque nous secoue : je viens de vivre la première réplique sismique, ce que je ne compris qu’en voyant mes interlocuteurs effectuer un saut au milieu de la rue. Il est 16h50.

Samedi 28 février 04

Ce matin, je vais me rendre dans les petits villages pour me rendre compte de la situation. J’accompagne un groupe de citoyens qui se sont organisés, depuis le tremblement de terre, et ravitaille les villageois des douars éloignés qui n’ont pas été sous les projecteurs des médias. Le comité spontané attend ce matin un camion de Tanger chargé de vivres, de chaussures et de vêtements neufs. Le rendez-vous est fixé à hauteur de l’entrée de la ville de Al Hoceïma, surnommé «contrôle», de par la présence permanente de la gendarmerie royale. En attendant dans la voiture l’arrivée du camion, je suis attirée par une foule nombreuse qui se masse devant l’entrée du Cercle Beni Ouriaghel. Curieuse, je traverse et pénètre dans le Cercle. A l’intérieur, dans un camion chargé de farine, un homme agite un sac en plastique rempli de cartes d’identité nationale, tandis qu’autour de lui, des hommes se pressent en hurlant à s’époumoner. C’est à ce moment que les «organisateurs», visiblement dépassés, décident de dresser un périmètre autour du camion, ce qui ne fait qu’augmenter la pression et les hurlements. Je demande à un jeune homme de répondre à quelques questions. Sans hésitation, il m’emboîte le pas et nous sortons du Cercle où il est bien évidemment impossible de s’entendre. Le jeune homme, répond à mes questions *, excité, d’une traite, le souffle souvent coupé par l’émotion :

«Le peuple veut de la literie, des tentes. On nous envoie de la farine et de l’huile. Nous, nous ne voulons ni farine, ni huile. Nous voulons un endroit où nous abriter. Une camionnette pour tous les habitants de Souani et d’Ajdir, c’est insuffisant. Les gens, comme vous l’avez vu, se disputent entre eux. Là (ndlr : endroit de la distribution), il y a des choses qui ne vont pas : les gens s’insultent et se disputent.

– Qu’est-ce qu’on vous distribue ?

– On distribue maintenant de la farine. En bas, il paraît qu’il y a une distribution de sucre, de farine et d’huile.

– J’ai vu qu’on vous avait enlevé vos cartes d’identité ? Est-ce exact? Pourquoi ?

– Oui, hier, ils ont ramassé les cartes d’identité pour assurer la distribution ce matin. Mais il y a un manque d’organisation et c’est la pagaille.

– Vous avez remis votre carte d’identité hier et vous ne l’avez toujours pas récupéré aujourd’hui ?

– Non.

– Que voulez-vous maintenant ?

– Je veux de la farine et de l’huile. Il y a cinq membres dans ma famille et je viens d’Ajdir. Je suis ici depuis ce matin très tôt (ndlr : l’interview se déroule à 9 heures, heure locale).

– Que pensez-vous de tout cela ?

– J’attends des membres de la Commune de Aït Youssef Ou Ali et de son Président qu’ils viennent sur place et qu’ils organisent tout ceci. Nous n’avons encore vu aucun d’entre eux. Nous avons contacté le wali qui nous a promis de nous envoyer des denrées alimentaires mais nous n’avons toujours rien vu (ndlr : j’ai essayé de joindre en vain les élus locaux dont il est question ici)».

Entre-temps le camion tangérois est arrivé et le convoi se dirige vers le douar d’Aït Abdelaziz, une petite localité qui dépend de la commune rurale de Aït Youssef Ou Ali. Un vieux monsieur, me voyant arriver, veut me servir de guide et m’explique * :

– Nous RIEN, absolument RIEN ! Le «makhzen» (ndlr : terme utilisé couramment pour désigner l’Etat et toute autre autorité) ne nous a rien apporté. La seule aide que nous avons eue est celle des citoyens. Cependant, le «makhzen» nous a apporté peu de choses, quelques boîtes de tomates, des pâtes, des haricots secs. Que voulez-vous que nous fassions avec cela ? Nous avons aussi reçu quelques couvertures pour enfants (une quinzaine) et une dizaine de petites tentes, sans armatures. Voilà ce que nous avons reçu par le biais de deux hélicoptères.

– Quand avez-vous reçu cela ?

– Hier (ndlr : le vendredi 27 février 04), en fin de matinée. Si ce n’était pas l’aide citoyenne, nos enfants seraient abandonnés à leur sort. Nous sommes dans un grand désarroi, nous vivons dehors depuis 5 jours maintenant. Le «makhzen» ne nous a guère considérés.

Des femmes légèrement vêtues et des enfants grelottant de froid se pressent l’un contre l’autre, devant des habitations dérisoires. Tout autour d’eux des maisons entières sont effondrées. Quant aux hommes, ils s’affairent devant un camion transportant des vivres et des couvertures. Un groupe de jeunes femmes m’accompagnent et me montrent ce qu’il reste de leurs maisons. De toute une vie, il ne reste rien, plus rien… Seulement quelques objets, témoignant du passage d’une famille décimée, comme ce couffin d’un bébé de mois …. Ou cette montre qui semble avoir rendu l’âme, elle aussi à 2h30, comme en attestent ses aiguilles…

Un petit enfant me montre une fosse, de laquelle, me dit-il, des voisins, aidés de volontaires, venus de la ville, ont dégagé son oncle. Devant une maison détruite, une immense place de terre fraîche accueille désormais les 33 sépultures des victimes du séisme. Faute de mains disponibles pour transporter les morts et les enterrer dans le cimetière situé en contrebas, les personnes décédées on été enterrées dans une fosse commune. Une jeune femme s’indigne * «nous aurions voulu enterrer nos morts dans le cimetière du village mais on nous a dit que le tracteur ne pouvait arriver jusque là » tandis qu’un homme du village tempère «il faut comprendre qu’il n’était pas possible de creuser 33 tombes. Il a fallu parer à l’urgence. Ceci dit, je précise que le tremblement de terre a eu lieu à 2h30 du matin et on n’a vu arriver le tracteur qu’à 11h30. C’est ça les secours ? Des secours dignes de ce nom doivent arriver au bout d’un quart d’heure, d’une demi-heure… Même s’ils sont venus secourir c’était trop tard. Ils n’ont pu qu’enterrer les gens dans une fosse commune».

Mon vieux guide, quant à lui, puise à nouveau dans ses souvenirs et interrompt ses voisins : «On a entendu des gens crier de sous les décombres mais nous n’avions pas les moyens de leur venir en aide. Après, il y a eu d’autres secousses, d’autres effondrements et les cris se sont éteints».

Les jeunes femmes, dans une dignité exemplaire, racontent, dans les menus détails, les moments cauchemardesques qu’elles ont vécu dans la nuit de lundi à mardi, procédant elles-mêmes au sauvetage de leurs proches, dans l’obscurité la plus totale, leur hameau étant démuni d’électricité. «Ma sœur a fait sortir ses enfants et son mari, qui a eu un malaise, par cette fenêtre avant de quitter à son tour la maison», m’explique Khadouje *, une autre habitante, en m’indiquant la pièce en question, avachie sur elle-même.

Dans un sanglot, elle explique : «mes deux sœurs sont actuellement à l’hôpital à Al Hoceïma. Nous n’avons pas eu la possibilité d’aller les voir. L’une de mes sœurs, mariée depuis un an et demi vient de perdre son bébé de 7 mois. Le couffin que vous voyez ici est le sien».

Les femmes expliquent qu’elles ont encore une immense peur «dans le cœur». «Chaque fois que la terre tremble, nous avons peur. De plus, nous sommes sales, nous ne nous sommes plus lavées depuis le tremblement de terre. Nous n’avons pas changé de vêtement non plus puisque toutes nos affaires sont sous les décombres. Tout est enterré. Parents, meubles, vêtements…».*

En quittant les lieux, une jeune fille se met à hurler : «Merci à notre peuple de nous avoir aidé. Ils nous ont procuré des vivres, des couvertures. Même si nous sommes encore démunis et que les hommes ici dorment sur des sacs de toile (ndlr : les sacs en toile de jute qui servent à contenir la farine, le sucre, le blé… sont souvent utilisés, dans les campagnes comme serpillières). Maintenant, nous avons enterré nos morts et nous devons penser aux vivants. Nos enfants et nous-mêmes sommes malades car nous avons attrapé froid. Nous avons toujours été oubliés et nous subissons à présent le tremblement de terre. Nous n’avons ni eau, ni électricité et maintenant nous sommes réduits à l’état d’animaux. Où habiter ? Comment vivre ? Notre seul espoir est le Roi ! Nous espérons qu’il nous aidera».*

Son cri de désespoir est insoutenable et l’ensemble des personnes sur les lieux s’en vont, en essuyant leurs larmes. Nous allons à présent nous rendre dans un autre douar montagnard, à Tizaghine, plus exactement. Devant nous, les mêmes scènes de cohorte de véhicules privés, venus apporter de l’aide aux sinistrés. A l’entrée du douar, un drapeau espagnol flotte sur une tente. C’est l’aide humanitaire, en provenance d’Espagne, qui a dressé ici son quartier général. Quelques mètres plus loin, on constate l’ampleur des dégâts devant le spectacle des maisons éventrées, dans ce village qui semble désert et mort.

Le cimetière du village est entièrement encerclé de ronces, ce qui signifie de nouvelles tombes. Un homme s’y recueille ; en pleurs, il nous livre qu’il pleure «ses morts».

Un peu plus loin, derrière quelques maisons détruites, je vois une famille, installée devant une petite tente. Ils prennent le thé et m’en proposent bien gentiment. «Tu as faim ? Tu veux manger ?».* Je suis épatée par l’accueil chaleureux, la générosité, l’envie de partager le peu qu’ils possèdent. Une femme de la famille m’informe que 8 de leurs voisins sont morts et aussi qu’ici «ils ne manquent de rien». «Nous recevons tous les jours du pain, du lait et hier, vendredi, nous avons reçu quelques tentes». *

Dans ce village électrifié depuis quelques années mais où les villageois sont toujours démunis d’eau courante, la vie s’est arrêtée, toutes les maisons ont été désertées, les enfants ne vont plus à l’école. «Nous ne faisons plus rien. Nous sommes tous dehors, inactifs. La terre a encore tremblé, à de nombreuses reprises, depuis la violente secousse. Nous avons peur, nous sommes perdus. Dès que la terre tremble notre cœur faiblit. Il a plu aussi et nous n’avions pas encore de tentes puisqu’elles n’ont été installées qu’hier par des Espagnols. Nous n’avons même pas de vêtements puisqu’ils sont ensevelis. Nous avons tout perdu».

Tout en invitant les femmes de sa famille à témoigner, une vieille dame plaisante : «je vais laisser les jeunes parler car moi je suis trop vieille».* Une autre membre de la famille se met alors aussi à expliquer : «Quand la nuit tombe, on ne souhaite qu’une chose c’est de voir le jour se lever. Nous avons peur la nuit tandis que la journée nous sommes dehors, nous voyons ce qui se passe. Quand la terre tremble la panique s’empare de nous». *

«Tu as déjà senti la terre bouger ?» me demande ma première interlocutrice. Je lui réponds que j’ai senti quelques répliques depuis mon arrivée hier. «Ca ce n’est rien, me répond-t-elle. Ce sont de petites secousses. Mardi matin c’était effrayant ! Jamais nous n’avons vécu cela».

Ici aussi les habitants n’ont pas pu compter sur les secours. «Nous avons nous-mêmes sorti nos voisins des décombres ainsi que les cadavres. A l’arrière, il y a une odeur insupportable due aux cadavres d’animaux qui se trouvent encore sous les gravats».

Les femmes, inquiètes pour leur avenir, confient «nous ne pouvons rester indéfiniment sous les tentes. Avec l’arrivée de la chaleur, nous serons très rapidement chassés par les scorpions et les serpents».

A Aït Hicham, une bourgade de Aït Youssef Ou Ali, fortement touchée par le séisme, l’heure est aussi à l’organisation. Un responsable local, El Ghabzouri Haddi explique que la mise sur pied d’un comité organisationnel a été incontournable, devant l’ampleur de la pagaille ambiante. «Nous avons connu quelques mésaventures, ici, mercredi. Un camion a été pris d’assaut par des personnes étrangères au douar et cela donne, de nous, une très mauvaise image, à l’extérieur. Aujourd’hui nous avons dissocié trois catégories d’habitants ; ceux de la ville, ceux de la Mosquée et ceux de «contrôle». Chacun de ces trois groupes d’habitants sera desservi séparément». *

De retour en ville, l’effervescence est toujours de guise. Les camions de «la chaîne de solidarité» ne cessent d’affluer, bondés de victuailles et de matériels divers et toujours drapés dans leur calicot indiquant leur ville d’origine.

Je n’ai pas eu accès à l’hôpital Mohammed V, ce matin et ce début d’après-midi pour cause de visite royale. Le Docteur Mohamed Salhi, directeur-médecin de la clinique Bades me téléphone pour m’inviter à la visite de l’hôpital. Nous y sommes reçus par le Docteur Chakibi Abdelradim. Outre la petite tension qui semble encore subsister après la visite royale, «il n’y a plus de problèmes», confie notre hôte. Le «plus de problèmes» est certainement à relativiser, en regard de l’intense activité et gestion de l’urgence qui ont prévalus jusqu’à cette matinée. «Nous avons opéré 26 blessés, qui sont arrivés dans un état très grave dont trois hémorragies internes». Et pour terminer la liste froide des chiffres, on peut ajouter qu’ici à l’hôpital d’Al Hoceïma, quelques 620 blessés ont été admis dont 121 sont encore entre les murs et 14 autres, gravement blessés ont été évacués sur l’hôpital militaire Mohammed V à Rabat, le CHU Ibn Sina (Avicennes) de Rabat et une clinique privée à Nador. Par ailleurs, l’hôpital Mohammed V, d’une capacité totale de 330 lits s’est vu renforcer par le dispensaire, l’orphelinat et un hôpital militaire de campagne spécialement dressé à Imzouren. A ce manque de lits, les médecins sont confrontés aujourd’hui à un autre problème épineux : celui des patients qui ne veulent plus quitter l’hôpital, pour des raisons non pas médicales mais simplement psychologiques, estimant certainement qu’ici ils sont en sécurité.

Avant de nous faire visiter l’aile chirurgicale réservée aux femmes, le docteur Chakibi nous donne encore quelques informations générales. «Pour le moment les patients sont pris en charge à tous les niveaux, tant médical que psychologique car nous avons des personnes qui ont perdu plusieurs membres de leur famille. Les véhicules privés ont ramenés 32 personnes à l’hôpital, contre 28 transportés par ambulance. Ceci vous donne une indication des secours sur lesquels la population a pu compter. Heureusement que les blessés ont bénéficié de l’élan de solidarité des voisins et autres qui ont mobilisés, qui leur taxi, qui leur camionnette, qui leur voiture… Je n’ai pas encore de chiffres exacts mais je sais que durant les six premières heures après la secousse, nous avons reçu de nombreux blessés. De nombreux blessés sont certainement décédés faute de secours, ce qui explique que le nombre de blessés et quasi identique à celui des morts. Non, vraiment les secours n’étaient vraiment pas de haut niveau ! Je peux l’affirmer dire quand j’ai vu des gens arriver à pied, après une marche de 5 kilomètres, avec une porte faisant office de civière».

Aïcha Moussaoui, une femme, âgée d’une cinquantaine d’années, originaire de Imzouren a été sauvée in extremis par son fils et a perdu 4 enfants, sa petite-fille et son époux. «Elle est arrivée à 4 h du matin, soit 1 heure 30 après le séisme, dans un véhicule privé. Pourtant elle habite à Imzouren, à quelques kilomètres d’ici et les routes sont praticables, soupire le Docteur Chakibi».

Son fils, qui, avec sa mère, est le seul survivant de la famille, n’a eu la vie sauve que grâce à une demande de visa effectuée à Rabat. Lors du tremblement de terre, il était dehors pour se rendre à Nador, avant de se diriger vers la capitale. Ce qui lui vaudra non seulement la vie sauve mais lui permettra de revenir sortir des décombres son père et sa mère. Pour ses frères il est malheureusement déjà trop tard. Quant à son père, il perdra la vie à l’hôpital. Comme pour mieux réaliser lui-même ce qui lui est arrivé, il sort de sa poche la convocation salvatrice et nous la montre. «Regardez, la date du rendez-vous était bien fixée au 24!». *

Le Docteur Chakibi est appelé aux urgences et passe la main à son collègue le Docteur Azzouzi Abderrahim. «Me permettez-vous de vous inviter à boire un café à la cafétaria ? Je n’ai rien mangé depuis ce matin et un café me ferait le plus grand bien !».

Avant de lui emboîter le pas, il est happé par deux hommes, inquiets, qui lui demandent des nouvelles. Il répond patiemment et nous rejoint. «Comme vous le voyez, les gens sont angoissés et traumatisés. Nous devons aussi gérer les visites intempestives, les membres des familles qui arrivent, à toute heure du jour et de la nuit pour s’enquérir de la santé ou de la vie d’un proche». Légitime mais épuisant pour le personnel soignant sur les dents depuis la nuit du séisme.

La tasse de café servie, la cigarette allumée, le Docteur Azzouzi se plie à l’exercice : «Aujourd’hui nous n’avons pratiquement plus de problèmes, c’est-à-dire que les malades qui avaient besoin d’être opérés l’ont été, ceux qui avaient besoin d’être soignés l’ont été, ceux qui avaient besoin d’être évacués vers d’autres hôpitaux l’ont été. Jusqu’au troisième jour, nous n’avons pratiquement reçu que des sinistrés mais depuis les choses se sont normalisées et nous recevons à présent de la pathologie ordinaire. La vie reprend son cours sauf que comme il y a eu quatre jours d’activités intenses, cela se fait avec un peu de difficulté. Les moyens ayant été concentrés sur l’urgence commencent à se faire sentir, les lits d’hospitalisation se font à nouveau rares». A la question de savoir comment faire sortir de l’hôpital les patients qui n’ont plus besoin de soins, le médecin répond, sincèrement : «Je ne sais pas. Le problème qui se pose c’est que les personnes qui peuvent sortir risquent de ne pas trouver d’endroits où ils peuvent être pris en charge. N’oublions pas que des personnes ici ont perdu toute leur famille. C’est un problème très grave. Je ne pense pas que jusqu’à présent on y ait véritablement pensé et réfléchi de manière sérieuse. Moi même je ne sais pas comment gérer ces sorties».

Ce tremblement de terre, véritable drame humain permettra-t-il à tout un chacun de tirer des leçons et des enseignements, à tous les niveaux, quant à la prise en charge des sinistrés, l’organisation des premiers secours ? Ici, à l’hôpital, le docteur Azzouzi certifie que c’est le cas. «On n’est certainement loin d’être parés pour vivre ce genre de situation. Tout ce qui a été fait l’a été fait dans l’improvisation. Quand une catastrophe de ce genre survient, tous les moyens doivent être mobilisables très vite. Ce n’était pas le cas. Les choses se sont faites grâce à la mobilisation de tout un chacun, sans plan pouvant faire face à un afflux massif de sinistrés».

Et de manière structurelle, la question inévitable est celle de la réhabilitation de la région, zone enclavée et oubliée des autorités depuis des décennies, de la qualité de ses routes, de l’infrastructure existante. Là aussi la question fuse, rapide : «Personne ne peut prétendre que l’infrastructure -pas seulement hospitalière- est suffisante. Cette région est très démunie en infrastructure sanitaire même si globalement le domaine de la santé, par rapport à la catastrophe, a peut-être été celui qui a réagi avec le plus de célérité et d’efficacité. Il n’empêche que c’est insuffisant. On a dû procéder à des évacuations, avec tous les problèmes que cela pose, uniquement par manque de moyens d’investigation. Nous n’avons pas de scanner, par exemple. Mais enfin, il vient d’arriver ! Quand on parle de structures sanitaires, il ne s’agit pas seulement de l’hospitalier, cela inclut aussi des unités mobiles de secours, de réanimation…Même si cela existait, compte tenu de la vétusté de la voirie, de l’inexistence des routes, peut-être tout cela n’aurait pas servi à grand chose».

Nous prenons congé du docteur Azzouzi et nous rendons, avec le docteur Salhi, en pédiatrie. Dans cette chambre logent 6 enfants, dont 2 totalement orphelins. Leïla, magnifique petite fille rousse, âgée de 7 ans, nous gratifie d’un lumineux sourire innocent. Une voisine, à peine plus âgée qu’elle, assise à son chevet explique que Leïla a perdu toute sa famille. Dans la rangée d’en face, trois enfants d’une même fratrie nous expliquent qu’ils ont perdu leurs parents et un de leur frère.

Dimanche 29 février

Ce matin, je descends à Sabadia, une des plages de Al Hoceïma où un camp a été dressé, par les soins d’une unité belge. Dans les tentes, les femmes préparent le petit déjeuner. Zohra, une maman, d’une quarantaine d’années, dont les enfants dorment encore à l’intérieur, vient de revenir de la ville où elle a été recueillir quelques affaires de sa maison.

Dans un français presque impeccable elle raconte, à son tour, ses déboires et malheurs : «A deux heures et demie, nous dormions tous quand tout à coup, quelque chose de très fort nous a réveillés. Les enfants pensaient qu’ils rêvaient. Je ne sais pas comment vous expliquer. Je suis cependant très contente de pouvoir bénéficier d’une tente, grâce aux Belges. Beaucoup n’ont pas cette chance. Les enfants ont toujours très peur et nous ne pouvons pas rentrer à la maison. Nous passons tous la nuit dehors et il fait très froid. Il nous manque des couvertures et de la nourriture. Moi j’ai quatre enfants, j’ai perdu mon mari depuis 13 ans et c’est très difficile pour moi. Je lance un appel au monde entier d’aider, même de la manière la plus minime, les gens qui vivent de véritables drames, comme à Imzouren, par exemple».

Dans le camp «belge», le Colonel Eddy Lapon, un «pro» des tremblements de terre qui a déjà assuré l’aide aux populations à El Asnam (Algérie) et Bam (Iran) fait le tour et vérifie la solidité des tentes, menacées par un vent violent qui souffle. Le Colonel Lapon et son équipe sont arrivés à Al Hoceïma, le mardi, jour du séisme après avoir pris contact avec un responsable de la Protection Civile qui l’a envoyé vers le wali. «Après avoir obtenu les autorisations d’usage, on a déployé ici 100 tentes familiales qui abritent aujourd’hui environ 500 personnes. Puis on nous a demandé de monter un deuxième site, à quelques mètres plus loin, mais on n’a pas pu le faire car les camions ont été bloqués par la population, des gens qui voulaient une tente individuelle. Cela se passait le mercredi dernier. Jeudi, un avion est arrivé avec 300 tentes et j’ai distribué moi-même ces tentes dans des montagnes, près de Tetouan. On a réussi à fournir des tentes à tout un village là-bas. Nous avons organisé ces camps mais demain nous partons et nous remettons la gestion et l’intendance de ces camps aux autorités municipales. La population ici s’est auto-organisée et une dizaine de personnes gèrent le camp». Est-ce à dire que la Belgique n’assurera plus aucun suivi, une fois les responsables partis ? «Normalement, notre mission s’arrête ici mais je sais qu’il y a encore un avion belge qui va arriver avec un autre chargement de tentes et de vêtements, récoltés par des associations marocaines en Belgique».

Et le conseil final du Colonel Lapon qui a vécu avec la population locale depuis près d’une semaine est la suivante : «Les gens ont peur de retourner à l’intérieur de leurs maisons, même si elles n’ont pas été touchées par le tremblement de terre. Il y a encore de nombreuses répliques, ce qui n’incite pas au retour à domicile. Les autres pays devraient faire comme la Belgique et envoyer des tentes, des couvertures et des vêtements pour laisser vivre les gens convenablement dehors. Les répliques d’un tremblement de terre peuvent durer 2 à 3 semaines et tant que ces répliques n’ont pas cessées, les gens ne rentreront pas chez eux».

Sur la route, nous rencontrons Hassan Saihi, un immigré espagnol, arrivé de Malaga, avec une camionnette remplie de tentes, de lampes de poche et de sacs de couchage. Il va se rendre dans les montagnes, à Tafrast et à Zaouia Sidi Youssef.

A Tafrast, Hassan est très rapidement rejoint par un convoi impressionnant, en provenance de Nador, avec à son bord, une troupe de scouts, joyeux et dynamiques. Très vite, la place de la mosquée prend des allures de fête. Le déchargement dans la salle de la mosquée qui sert de dépôt collectif se fait en chansons ponctuées par de stridents coups de sifflets. On en oublie quelque peu le drame survenu il y a quelques jours…

Je continue ma tournée rurale en mettant le cap sur Imhaoulen, au-dessus duquel tournoie, dans un champ, un hélicoptère de la gendarmerie royale. Dans un vrombissement d’enfer, il se pose au sol, pendant que des villageois, hommes, femmes, enfants, jeunes et vieux accourent, de toute part.

Les enfants s’agglutinent autour de l’hélicoptère duquel des hommes déchargent, à même le sol, quelques couvertures, quelques tentes et quelques sacs blancs contenant probablement des denrées alimentaires. Je laisse les habitants du village à leur distribution et prend la route de Zaouia Sidi Youssef, toute proche. Là aussi, même scène de distribution et de solidarité. J’accoste un habitant, Hamadi Boutahar, âgé de 46 ans qui revient de la distribution, transportant un sac contenant du pain, deux couvertures, de l’huile, du lait et quelques mètres de plastique. Il n’a perdu aucun membre de sa famille mais sa maison a été détruite et son troupeau décimé. «Nous vivons des jours noirs depuis mardi dernier. La pluie, le froid et la faim sont notre lot quotidien. Ce sont des citoyens, venus de Melilla, de Nador, de Tanger qui nous ont aidé depuis le tremblement de terre. Nous leur en sommes reconnaissants».

Lorsque je lui fais part de l’hélicoptère qui vient de se poser, à quelques centaines de mètres, il ajoute : «Oui, effectivement, il y a deux ou trois hélicoptères qui sont venus dans notre région mais tout le monde n’a pas pu bénéficier de l’aide. Ils ont lâché les produits et puis sont repartis. Ici, c’est différent. Allez voir l’organisation. Elle est assurée par l’imam de la mosquée, sous la surveillance des personnes qui viennent nous apporter l’aide alimentaire ou autre».

Je prends congé de ce patelin rural qui clôturera ma courte visite. Il est bientôt 18 heures, l’heure de mon rendez-vous avec la Coordination des Associations d’Al Hoceïma. Dans le local de l’Association Marocaine des Droits de l’Homme, les représentants de différentes associations -plus particulièrement des associations de développement local, de femmes, de défense des droits humains- composant la Coordination prennent place autour de la table. Depuis mercredi dernier, conscients que l’union fait la force, une quarantaine d’associations sont tombées d’accord pour la création d’une structure les regroupant, chargée de défendre les intérêts des sinistrés.

Lemhallem Omar, membre de la Coordination décrit la genèse de la création de leur nouvelle structure. «Mardi, après le tremblement de terre, nous nous sommes rendus compte de l’ampleur des dégâts. Enormément de dégâts matériels mais aussi de lourdes pertes humaines. Nous avons alors convoqué une dizaine d’associations -nous sommes aujourd’hui 39- et nous sommes fixés deux missions. La première, celle de parer à l’urgence et de secourir les gens, en leur fournissant toute l’aide nécessaire, en ce compris l’acheminement de vivres, de matériel de première nécessité, de médicaments. La seconde mission est de penser déjà à la reconstruction. Nous avons mis sur pied un secrétariat, composé de 9 membres, un comité de permanents, chargé d’accueillir les gens qui viennent à l’association, un comité d’information et des coordinateurs pour chaque petit village, chargés de nous informer, de recueillir des données qui nous permettront d’avoir des données statistiques claires pour envisager toute politique sociale, de logement, d’aide… ultérieure».* La Coordination a aussi rédigé de multiples communiqués à l’attention des médias ainsi que des appels à la solidarité citoyenne. Par ailleurs, Omar se plaint aussi de la distribution des tentes qui devaient, en priorité être acheminées vers les villages ruraux, fortement touchés par le séisme.

Saïd El Farissi enchaîne sur le rôle de «l’Etat» qu’il juge extrêmement faible et surtout dans les trois jours qui ont suivi le tremblement de terre. «Le drame qu’ont vécu les habitants des villages ruraux est principalement dû au manque de routes praticables. De plus, la médiatisation s’est faite surtout autour de Aït Kamra et d’Imzouren. Alors que d’autres douars ont été touchés de manière encore plus dramatique». Saïd estime que la responsabilité de «l’Etat» est engagée depuis 94, date du précédent tremblement de terre. «La zone d’Al Hoceïma est une zone rouge et devait être considérée comme telle. Ce ne fut pas le cas». *

De leur côté, Zohra Koubi’r et Jamila Soussi, tiennent à attirer l’attention sur le sort des femmes, particulièrement touchées par le drame.

«Nous ne faisons bien sûr pas de distinction entre les hommes et les femmes, mais cependant nous avons constaté que de nombreuses femmes se sacrifient et préfèrent rester dans le village, alors qu’elles méritent des soins. Nous avons vu une femme qui avait les ongles arrachés et qui n’avait reçu aucun soin. Les hommes peuvent se déplacer, seuls et aller se faire soigner. Pour une femme c’est impossible, elle doit être accompagnée».

Dans ces régions, très conservatrices à l’égard des femmes, Zohra et Jamila constatent que de nombreuses femmes sont harcelées dehors. «Elles se plaignent de l’attitude des hommes, des militaires, qui les harcèlent et sont choquées par ces comportements, inadmissibles, surtout dans une période aussi douloureuse que celle-ci».*

Omar Moussa Abdallah, quant à lui, est chargé des relations avec les autorités et les institutions officielles. Il se plaint de la lenteur des autorités qui n’a convoqué les associations locales que jeudi dernier, pour une réunion avec la Fondation Mohamed V. Lenteur, retard, encore et toujours…

Quelques réflexions…
Vivre trois journées au quotidien le drame d’une population, c’est peu, bien peu. Tout en connaissant la région du Nord, dont je suis originaire, je n’aurai cependant nullement la prétention de prétendre avoir une photographie complète et exacte de la situation.

Cependant, forte des témoignages que j’ai rassemblés durant ces trois intenses journée, je me permets de livrer, à qui veut les lire, quelques réflexions. Subjectives certainement, sincères réellement…

J’ai été frappée par la solidarité spontanée des citoyens marocains qui ont, avec brio, aidé les plus démunis à s’abriter, même de manière sommaire, à s’alimenter, à se soigner, à enterrer les victimes, alors que les autorités tant locales que les autres ne sont arrivés qu’après trois ou quatre jours. Souvent trop tard… ou, sous les feux des projecteurs, dans des mises en scène frisant le ridicule mais surtout indécentes.

Je reste admirative devant le travail des associations, des volontaires qui se sont mobilisés, dès les premiers instants du drame, vaquant à l’urgence tout en s’interrogeant sur la construction du futur.

Quant aux femmes, longtemps reléguées au ban de la société marocaine, elles ont à nouveau prouvé combien elles sont efficaces dans leur capacité de mobilisation, d’organisation et d’intendance. Osons espérer que les hommes de la contrée, connus pour leur esprit conservateur, «lâcheront la bride traditionnelle» et reconnaîtront que les femmes, à leur côté, constituent une force et non une menace. Ces femmes remarquables doivent être soutenues et bénéficier d’instruments qui leur permettent d’appréhender leur environnement de manière globale. Pour ce faire, l’alphabétisation et l’accès au savoir sont deux vecteurs d’émancipation qu’il ne convient plus de remettre en question. Or, si de nombreuses personnes (hommes et femmes) se sont vues coupées de ce droit, la proportion la plus grande se retrouve dans la gent féminine et plus particulièrement dans les zones rurales.

Comme le soulignaient Zohra et Jamila, le tremblement de terre a mis en exergue un phénomène connu : en tant de crise, en tant de guerres, ce sont toujours les femmes qui paient le plus lourd tribut. Dans les zones rurales, même dans des périodes hors crises, les problèmes se posent toujours en termes plus aigus pour les femmes, de par leurs conditions de vie. Des femmes perdent encore aujourd’hui la vie, des suites d’accouchements car les routes sont inexistantes pour pouvoir les transporter à l’hôpital, elles ne sont pas scolarisées car elles sont soumises à des tâches pénibles comme celle, par exemple, de faire plusieurs kilomètres par jour pour s’approvisionner en eau. Ces femmes rurales ne peuvent plus être les oubliées des programmes de coopération et de développement. Elles doivent être formées afin de devenir à leur tour des actrices de changements et des relais au sein de leur douar, village, région.

Comme je l’ai souvent affirmé, je suis loin d’être une indépendantiste, aspirant à une indépendance géographique ou politique du Rif. Tout en plaidant pour un Maroc uni et unifié, j’aspire cependant à ce que chaque citoyen puisse jouir pleinement de la faculté d’exercer son droit à parler la langue qu’il souhaite, se référer à sa culture et surtout ne pas vivre une marginalisation en fonction de son appartenance. Je continuerai à défendre ce principe, avec toutes les forces vives qui défendent les mêmes valeurs, sans ostracisme et sans tomber dans un discours régionaliste et réduit à leur seule «communauté».

Le tremblement de terre d’Al Hoceïma restera à coup sûr dans les annales «noires» de l’histoire du Maroc. Que les nombreux morts ne soient pas partis «pour rien» et que l’entièreté des décideurs politiques utilisent ce drame pour tirer un bilan honnête et surtout pour formuler une politique de décentralisation de toutes les contrées enclavées. Une politique basée sur la proximité locale, avec des élus locaux, jouissant de pleins pouvoirs et non en attente perpétuelle des ordres «d’en haut» ou «d’en bas» -c’est selon- est le pilier essentiel de la démocratie.

L’objectif à atteindre est celui de rendre à tous les citoyens et citoyennes marocain(e)s, la reconnaissance à laquelle ils ont droit. Toutes les régions du Maroc, du Nord au Sud, doivent être traitées comme des régions du Maroc à part entière et non comme des petites annexes insignifiantes.

Fatiha SAIDI,

Al Hoceïma,

* Les interviews signalées par l’astérisque ont été réalisées en rifain et traduites par mes soins.

Pour toute information complémentaire ou pour obtenir les photos :

fatiha.saidi@ibelgique.com

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Houceima : VOLS ORGANISES LEGAUX : détournement de l’aide

Les deux camionnettes de Gennevilliers sont arrivées au port de Nador le samedi 6 mars à 14h. Elles ont été acheminées par trois jeunes de Gennevilliers originaires de TEMSAMEN et d’un autre d’Aulnay-Sous-Bois. Au port, les jeunes apprennent que toutes les aides dont la destination n’a pas été enregistrée par l’Ambassade du Maroc et les autorités locales en collaboration avec les associations locales va directement à la fondation Mohamed 5 !!!

Les jeunes ont été obligés pour sortir du port de signer un bon de livraison à la Fondation et ce malgré leurs protestations et l’intervention de Youssef HAJI au téléphone.

Les portes des deux camions ont été plombées et on a retiré leur passeport à ces bienfaiteurs sympathisants de l’ATMF. Les négociations ont durés trois heures sur le port et décision a été prise d’avaler son humiliation et de prendre le convoi avec la gendarmerie jusqu’à AL HOUCEIMA.

A 22h, les camionnettes arrivent à AL HOUCEIMA. Les membres présents de la coordination AL AMAL et le représentant de l’ATMF rassurent les jeunes convoyeurs et attendent l’arrivée des gendarmes pour négocier la destination des dons rassemblés par les jeunes eux mêmes et les militants de l’ATMF de Gennevilliers. A 1h du matin, nous avons épuisé tous les sujets de conversation concernant le sinistre, l’enclavement du Rif, la HOGRA ressentie ici et de l’autre côté de ma méditerranée, le travail qui se raréfie, les programmes de la télé marocaine captés en France qui ne changent pas pour accompagner le deuil des familles alors que cette même grille de programmes, deux semaines auparavant, a été chamboulée lors de la CAN 2004, … Les 4000 Kms parcourus, le stress, la fatigue nous poussent enfin à aller à la permanence de la douane d’EL HOUCEIMA pour s’inquiéter du retard des gendarmes, récupérer les passeports et quémander le droit d’ouvrir notre camionnette.

A cette permanence aucune présence de douaniers dans les bureaux sauf des discussions qui s’échappent de deux tentes installées sur le parking. Un douanier en pyjama sort de l’une des tentes et nous suggère de repartir là d’où nous venons et de tenter de trouver un interlocuteur à la Wilaya.

Le membre de la coordination EL AMAL qui nous accompagne nous donne le numéro téléphone du portable du Wali en personne. Youssef téléphone et tombe sur une messagerie, ne laisse pas de message ; mais à sa surprise il est rappelé par ce dernier. Il expose les faits, assure le Wali que cette aide de l’ATMF n’est nullement destinée ni à la fondation Mohamed 5, ni au marché de la contrebande, ni à la Salafia el Jihadia, que cette aide est destinée aux pauvres sinistrés, aux village reculés que nous avons recensés avec les militants de la coordination EL AMAL et par nos propres réseaux de rifains de France. Nous exprimons aussi au Wali notre indignation quant à l’accueil réservé à la crème de la jeunesse marocaine vivant en France qui laisse travail et loisirs pour venir participer à cet élan de solidarité citoyenne.

Au grand étonnement de Youssef, le Wali manifeste une qualité d’écoute indéniable à laquelle nous ne sommes pas habitués dans cette portion de la Méditerranée, et nous promet l’arrivée des douaniers sur place pour régler ce problème.

A 2h du matin, toujours sous la brume d’EL HOUCEIMA, nous négocions au téléphone avec un responsable de la douane qui nous propose sans fou rire de repartir sur l’aéroport d’EL HOUCEIMA afin de refaire les formalités administratives. Nous refusons la proposition pour la simple raison que ni les conducteurs, ni notre état de fatigue ne nous permettent de reprendre la route pour regagner l’aéroport. 20 mn après, les douaniers arrivent, nous réclament le bordereau signé au port de Nador et exigent le retour des camionnettes au dépôt de la fondation M5. Rebelote, discussion, négociation, téléphone entre administrations, attroupement. Arrive alors un jeune issu de l’immigration grenobloise qui nous informe que notre cas n’est pas unique, qu’il s’est fait lui aussi « entuber ». Le contenu de sa camionnette destiné à un village de la région a été détourné vers cette même Fondation M5. Le jeune homme est blême et n’arrête pas de sautiller en répétant « les enfoirés m’ont eu » et « ma mère m’avait dit que je n’avais pas à me mêler de tout cela ». Youssef oublie les douaniers et essaye de calmer le jeune grenoblois en lui assurant qu’on allait s’occuper de son cas et qu’il ne partira pas à Grenoble sans superviser lui-même la distribution des ses dons. Le jeune, mélangeant le rifain, le verlan et l’arabe, nous répète que c’est plus que des dons, c’est du matériel tout neuf sponsorisé par Décathlon entre autres et la récolte d’argent de la jeunesse grenobloise. Nous apprenons plus tard que Abdelwahab (c’est son prénom) est un sportif connu dans la région pour l’organisation de tournois de foot en salle de haut niveau.

Le chef douanier, toujours dans sa voiture, donne son accord pour qu’on puisse entrer dormir mais à condition de nous escorter et d’enregistrer le lieu de notre hébergement ! Nous nous dirigeons vers le quartier de notre ami Belhaj de Gennevilliers avec les camionnettes toujours plombées. Le chef douanier nous indique avec un ton dégoûté que nous n’avons toujours pas le droit d’ouvrir les portes des camionnettes avant le matin. Les jeunes commencent à perdre patience et signalent au chef douanier qu’ils doivent récupérer leurs affaires, les clés de la maison… et qu’ils sont jusqu’à maintenant très corrects car ils lui demandent l’autorisation d’ouvrir leurs propres camionnettes. Alors que les douaniers de Nador dans un zèle d’incompétence très makhzénien avaient omis de plomber les portes latérales des deux camionnettes. Rires étouffés de tout le monde, douaniers compris, sauf le chef qui joue son rôle de responsable à 2 dirhams. Youssef perd le sud de la méditerranée et arrête toute négociation en regrettant haut et fort qu’Allah n’est pas juste, il aurait dû frapper plus fort dans son tremblement de terre pour qu’EL HOUCEIMA et sa région soient repoussées un peu plus au nord pour épouser la côte espagnole. Le chef devient blême, téléphone, demande le numéro de la carte nationale de l’accompagnateur de la coordination EL AMAL, et avec une suffisance makhzéniennne, nous dit : cette fois-ci, je vous laisse faire mais la prochaine fois, il faudra vous organiser autrement !! Kafka, dépassé par cet absurde, doit certainement se retourner dans sa tombe et la baraka d’Abdelkrim EL KHATTABI a sauvé les camionnettes de Gennevilliers. Il est 3h30 du matin. Les gennevillois auront 3 h de sommeil pour être réveillés vers 7h par une secousse d’une magnitude sismique de 5, 3° leur souhaitant la bienvenue.

Aujourd’hui, mardi 8 mars, journée internationale de la femme, nous avons une pensée pour les femmes qui luttent pour l’égalité, la fin de l’hégémonie du mâle, … Mais, tout cela, c’est du blabla, car notre énergie est axée uniquement sur la récupération des dons du Grenoblois Abdewahab pour lui rendre sa dignité masculine bafouée.

Au secours, rendez-nous le camion de Grenoble, sinon on fera appel au Zelzal pour faire tomber l’impressionnant bâtiment d’EL ÂMALA (préfecture) avec son architecture basriste.

EL HOUCEIMA Le 8 mars 2004

NB : Fait de Youssef, aidé par Larbi, excusez nous les fautes et les formulations de phrases, nous travaillons dans des conditions minimales.

Contact, information et presse :
Youssef HAJI, Larbi MOCHHOURY
ELHOUCEMA et sa région tél : (00 212) (0)70 28 74 71
France : Collectif SOS EL HOUCEIMA,10rue Affre 75018 Paris,
Tél : 01 42 52 60 61. www.atmf.org